République tchèque: Méthanol, prohibition et rôle de l’État
République tchèque: Méthanol, prohibition et rôle de l’État
Par Céline Bayou (sources: ČTK, Právo, Bloomberg, Radio Praha)
regard-est, 1-X-12
Une vague d’intoxications au méthanol a provoqué la mort de 26 personnes, des dizaines d’autres se trouvant hospitalisées, et secoue la République tchèque depuis quelques semaines. Elle a conduit le gouvernement à imposer, depuis le 14 septembre, une interdiction des ventes et des exportations de spiritueux contenant plus de 20% d’alcool, le temps d’identifier et retirer du marché les bouteilles incriminées. Environ 20 millions de bouteilles sont stockées dans des entrepôts, tandis que les débits de boissons ont été priés de retirer de la vente 4 millions de litres.
Les conséquences de cette prohibition, la plus stricte depuis vingt ans, sont lourdes pour les producteurs, négociants et vendeurs qui craignent que l’affaire n’ait entamé pour longtemps le capital-confiance dont jouissait jusqu’alors le pays en tant que producteur de spiritueux. Le ministre tchèque des Finances a bien laissé entendre que les producteurs d’alcool pourraient bénéficier d’une exonération d’impôt sur l’alcool qu’ils ont acheté légalement, mais il n’a pas évoqué de compensation.
Deux hommes ont été arrêtés, soupçonnés d’être les responsables de cette vague d’intoxications. Selon le procureur Roman Kafka, ils auraient coupé l’alcool au méthanol et l’aurait livré à un distributeur de la ville de Zlin. Ce dernier aurait ensuite mélangé l’alcool frelaté avec de l’éthanol, avant de le mettre sur le marché, partant du principe que le mélange méthanol-éthanol serait neutralisé et ne présenterait donc pas de danger pour les consommateurs... La police a indiqué que 15.000 litres d’alcool frelaté serait en circulation sur le marché tchèque (tout particulièrement en Moravie-Silésie), dont un tiers environ n’a pas encore été localisé.
Le gouvernement a annoncé l’imposition d’un contrôle strict et d’accises sur les importations de méthanol. Celles-ci, en provenance essentiellement de Russie et d’Allemagne, ont triplé depuis 1999, représentant 631 millions de couronnes en 2011. De leur côté, les importations d’éthanol, d’alcool et de liqueur représentent 2 milliards de couronnes par an. Or, les accises sur les spiritueux sont passées, elles, de 195 couronnes par litre à 285, ce qui a évidemment renforcé la motivation des producteurs d’alcool de contrebande.
Ce scandale dramatique pose la question du rôle de l’État qui, pour certains, tolère depuis trop longtemps le marché noir d’alcool. Le libéralisme qui règne dans le pays ne devrait pas rimer, notent-ils, avec désengagement de l’État et c’est bien à lui qu’incombe le rôle de garant du respect des règles. Le politologue Jiří Pehe va jusqu’à déclarer que, dans de telles conditions, l’État constitue un danger pour la société. La critique directe du Président Václav Klaus, adepte de la «main invisible du marché», n’est pas loin.
Dans l’immédiat, la prohibition inquiète aussi très directement les autorités: l’État collecte environ 750 millions de couronnes par mois sur les taxes liées aux ventes d’alcools forts. Ladislav Mincic, vice-ministre des Finances, remarque qu’une levée tardive de la prohibition pourrait compliquer la lutte menée par le gouvernement contre le déficit du budget.
regard-est, 1-X-12
Une vague d’intoxications au méthanol a provoqué la mort de 26 personnes, des dizaines d’autres se trouvant hospitalisées, et secoue la République tchèque depuis quelques semaines. Elle a conduit le gouvernement à imposer, depuis le 14 septembre, une interdiction des ventes et des exportations de spiritueux contenant plus de 20% d’alcool, le temps d’identifier et retirer du marché les bouteilles incriminées. Environ 20 millions de bouteilles sont stockées dans des entrepôts, tandis que les débits de boissons ont été priés de retirer de la vente 4 millions de litres.
Les conséquences de cette prohibition, la plus stricte depuis vingt ans, sont lourdes pour les producteurs, négociants et vendeurs qui craignent que l’affaire n’ait entamé pour longtemps le capital-confiance dont jouissait jusqu’alors le pays en tant que producteur de spiritueux. Le ministre tchèque des Finances a bien laissé entendre que les producteurs d’alcool pourraient bénéficier d’une exonération d’impôt sur l’alcool qu’ils ont acheté légalement, mais il n’a pas évoqué de compensation.
Deux hommes ont été arrêtés, soupçonnés d’être les responsables de cette vague d’intoxications. Selon le procureur Roman Kafka, ils auraient coupé l’alcool au méthanol et l’aurait livré à un distributeur de la ville de Zlin. Ce dernier aurait ensuite mélangé l’alcool frelaté avec de l’éthanol, avant de le mettre sur le marché, partant du principe que le mélange méthanol-éthanol serait neutralisé et ne présenterait donc pas de danger pour les consommateurs... La police a indiqué que 15.000 litres d’alcool frelaté serait en circulation sur le marché tchèque (tout particulièrement en Moravie-Silésie), dont un tiers environ n’a pas encore été localisé.
Le gouvernement a annoncé l’imposition d’un contrôle strict et d’accises sur les importations de méthanol. Celles-ci, en provenance essentiellement de Russie et d’Allemagne, ont triplé depuis 1999, représentant 631 millions de couronnes en 2011. De leur côté, les importations d’éthanol, d’alcool et de liqueur représentent 2 milliards de couronnes par an. Or, les accises sur les spiritueux sont passées, elles, de 195 couronnes par litre à 285, ce qui a évidemment renforcé la motivation des producteurs d’alcool de contrebande.
Ce scandale dramatique pose la question du rôle de l’État qui, pour certains, tolère depuis trop longtemps le marché noir d’alcool. Le libéralisme qui règne dans le pays ne devrait pas rimer, notent-ils, avec désengagement de l’État et c’est bien à lui qu’incombe le rôle de garant du respect des règles. Le politologue Jiří Pehe va jusqu’à déclarer que, dans de telles conditions, l’État constitue un danger pour la société. La critique directe du Président Václav Klaus, adepte de la «main invisible du marché», n’est pas loin.
Dans l’immédiat, la prohibition inquiète aussi très directement les autorités: l’État collecte environ 750 millions de couronnes par mois sur les taxes liées aux ventes d’alcools forts. Ladislav Mincic, vice-ministre des Finances, remarque qu’une levée tardive de la prohibition pourrait compliquer la lutte menée par le gouvernement contre le déficit du budget.